Tour d’horizon trimestriel | octobre 2022
Par: Ingrid Sapona | Temps de lecture : 16 min
Dans le présent numéro du bulletin Tour d’horizon trimestriel, nous abordons deux sujets qui ont un rapport avec les changements climatiques, sans toutefois y être directement liés. Le premier est celui des rénovations écologiques. Le lien entre celles-ci et les changements climatiques réside dans le fait qu'au Canada, les bâtiments sont responsables d'une quantité non négligeable d'émissions directes de gaz à effet de serre qui sont préoccupantes sur le plan des changements climatiques. Le second sujet est l'utilisation des données satellitaires par l'industrie de l'assurance. Bien que ces données puissent être utilisées à diverses fins, elles sont particulièrement pertinentes pour la prédiction (ou la gestion) des catastrophes naturelles, qui deviennent de plus en plus courantes en raison des changements climatiques.
Les rénovations écologiques
Les plus de 16 millions de logements et 482 000 bâtiments commerciaux et publics que l'on retrouve au Canada sont responsables de 13 % des émissions directes de gaz à effet de serre (GES) du pays . L'inclusion des émissions de GES attribuables à la production de l'électricité consommée par les bâtiments porte à 18 % le total des émissions occasionnées par l’environnement bâti . Compte tenu de ces faits, dans le cadre de l'engagement du Canada à atteindre la carboneutralité d'ici à 2050 , le gouvernement a proposé une Stratégie canadienne pour les bâtiments verts, qui vise à créer un secteur du bâtiment carboneutre et résilient aux changements climatiques d'ici à 2050. Le terme « carboneutre » signifie que les émissions de GES liées à l'exploitation sont à un niveau aussi proche que possible de zéro et que l'on compense les émissions restantes en éliminant une quantité équivalente de carbone (par exemple, au moyen de la capture de dioxyde de carbone). Aux fins de la Stratégie canadienne pour les bâtiments verts, est carboneutre le bâtiment qui « est très écoénergétique par sa conception » et qui « n'utilise que des énergies non émettrices pour le chauffage et l'électricité » .
Que ce soit en raison des prix élevés de l'énergie ou du souhait d'être de bons intendants sociaux en luttant contre le réchauffement climatique, de plus en plus de propriétaires de bâtiments commerciaux et d’habitations envisagent des options écologiques dans le cadre de leurs rénovations. La présente section du bulletin traite d’aspects des rénovations écologiques qui sont liés à l'assurance.
Il est utile de faire la distinction entre un « bâtiment intelligent » et un « bâtiment vert ». Un bâtiment intelligent est un bâtiment alimenté par des systèmes et des capteurs (souvent appelés technologies intelligentes) qui surveillent les systèmes du bâtiment et optimisent l'environnement et l'exploitation du bâtiment . Les technologies intelligentes sont des capteurs, de l'équipement, des applications, etc., qui dépendent généralement d'une connectivité Internet. Un bâtiment vert est un bâtiment qui, par sa conception, sa construction ou son exploitation, réduit ou élimine les effets négatifs sur le climat et l'environnement naturel et peut même créer des impacts positifs sur eux . De toute évidence, ces notions se recoupent, car les technologies intelligentes jouent souvent un rôle crucial dans le fonctionnement éco-efficace d'un bâtiment vert. Toutefois, les risques et les préoccupations liés à l'assurance qui découlent de l'installation de technologies intelligentes dépassent le cadre du présent document.
La rénovation écologique des bâtiments commerciaux
La rénovation écologique des bâtiments commerciaux est assez courante de nos jours, car les propriétaires cherchent à réduire leurs coûts énergétiques et à rendre leurs bâtiments plus intéressants pour les locataires. Bernard McNulty, agent principal et chef du service des sinistres pour le Canada chez Allianz Global Corporate & Specialty (AGCS), indique que la plupart des rénovations de bâtiments commerciaux dont il prend connaissance comprennent des éléments écologiques. « De nombreux propriétaires de bâtiments voient l'intérêt de rendre leurs bâtiments écologiques. Je pense que cela s'explique principalement par l'importance que leurs locataires accordent aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Lorsqu'une personne cherche des locaux pour bureau et que la plateforme de gouvernance de l'entreprise comprend un engagement envers les facteurs ESG, l'une des façons d’assurer le respect de cet engagement est de veiller à ce que ses locaux se trouvent dans un bâtiment respectueux de l'environnement. Mais il est aussi possible d'effectuer des rénovations écologiques pour réduire le coût du chauffage, demander un loyer plus élevé et fidéliser les locataires », explique M. McNulty.
Quand le propriétaire d'un bâtiment commercial décide d'entreprendre des rénovations majeures, il peut s'écouler plusieurs années entre la planification initiale et la remise en service du bâtiment. Pendant que les travaux de rénovation sont planifiés et évalués, que les matériaux sont achetés, etc., le contrat d'assurance des entreprises qui couvre le bâtiment demeure en vigueur. Toutefois, avant que le début des travaux de rénovation, le propriétaire souscrit une assurance des ouvrages en construction ou une assurance des chantiers, qui s'appliquera pendant toute la durée du projet. Une fois les travaux terminés et le bâtiment remis en service, le contrat d'assurance des entreprises demeure en vigueur pour le restant de la période d'assurance, mais si le bâtiment est certifié LEED à la suite des rénovations, on ajoute un avenant à ce contrat d'assurance pour en tenir compte.
La norme LEED (Leadership in Energy and Environmental Design) est la norme mondiale en matière de bâtiments verts , et aussi la norme la plus utilisée au Canada . En fait, en 2021, le Canada s'est classé au deuxième rang dans la liste annuelle des 10 meilleurs pays et régions du monde pour les bâtiments certifiés LEED. La norme LEED n'est cependant pas la seule norme de certification des bâtiments verts au Canada. Le programme de certification ENERGY STAR de Ressources naturelles Canada reconnaît les bâtiments de haut rendement au Canada, tout comme le font les Normes environnementales des bâtiments de l’association des propriétaires et des administrateurs d’immeubles ( BOMA BEST) .
Tous les contrats d'assurance des ouvrages en construction sont personnalisés, adaptés au projet en cause et souvent souscrits par tranches mensuelles en fonction de l'échéancier prévu du projet, indique M. McNulty. La nature de la rénovation détermine les questions et les préoccupations des personnes chargées d’apprécier le risque. Les assureurs comme Allianz possèdent une grande expérience dans les rénovations visant l'obtention de la certification LEED, par exemple; dans le cas de telles rénovations, le souscripteur aura moins de questions sur les matériaux utilisés. Toutefois, si la rénovation écologique n'a pas pour but l'obtention de la certification LEED, M. McNulty explique que les caractéristiques particulières du projet revêtiront une plus grande importance pour l'appréciation du risque. « Naturellement, nous examinons l'échéancier des travaux de construction afin de nous assurer qu'il est raisonnable, car l'échéancier est primordial lors de rénovations de grande envergure. Et nous nous penchons sur les caractéristiques techniques des produits qui seront utilisés, surtout si nous ne les connaissons pas. Mais, comme les normes LEED existent depuis longtemps, nous avons une grande confiance dans les produits qui ont été développés et utilisés dans le cadre des projets LEED, par exemple », dit-il.
La technologie qui sous-tend la révolution verte évolue rapidement, ce qui peut constituer un défi au chapitre de l’appréciation du risque. Dans le cas de produits ou de technologies qui ne sont pas d'usage courant, ou encore de méthodes de construction et de conceptions qui sont novatrices, des risques imprévus sont à craindre. En effet, dans son rapport SONAR de 2020, Swiss Re a soulevé la question à savoir si les bâtiments verts passeront l'épreuve du temps . Parmi les sujets de préoccupation relevés dans son rapport figurent le rendement insatisfaisant des produits, les défectuosités structurelles, les fuites, les moisissures, etc., qui peuvent tous entraîner des réparations coûteuses. Swiss Re a noté que « la vague d'innovation verte dans le secteur du bâtiment a entraîné une avalanche d'appellations, de notations et de programmes de certification. Ces éléments rendent difficile la détermination des normes pertinentes applicables à un projet particulier . »
Si la valeur du bâtiment est plus élevée par suite d'une rénovation écologique, il se peut que l'assurance doive être passée en revue et que des garanties supplémentaires doivent être envisagées. Selon M. McNulty, une fois le projet terminé, les améliorations apportées font augmenter la valeur du bâtiment commercial assuré et, par conséquent, la prime d'assurance. Il fait toutefois remarquer que la prime est notamment calculée d'après la valeur et le type de construction du bâtiment; la hausse de prime n'est pas directement attribuable aux éléments d'efficacité énergétique.
Un exemple d'avenant particulier que peut demander la personne qui possède d'un bâtiment certifié LEED est la garantie du coût du renouvellement de la certification dans le cas où le bâtiment subirait des dommages importants. Si le contrat d'assurance standard ne couvre pas les coûts du renouvellement de la certification, il peut être possible d'ajouter la garantie par voie d'avenant ou de personnaliser la définition des frais supplémentaires de manière à inclure ces coûts . Il faut aussi examiner les dispositions du contrat d'assurance des pertes d'exploitation, car la remise en service d'un bâtiment vert après un sinistre peut prendre plus de temps. En outre, toute caractéristique particulière, un toit végétal par exemple, a des propriétés et des composants uniques (une membrane étanche, par exemple) qui pourraient justifier la souscription d'une garantie couvrant une valeur à neuf plus élevée.
Étant donné le rythme auquel évoluent les produits de construction écologiques, si un composant écologique est endommagé, l'assureur le remplace à l'identique, mais il n'est pas rare que le composant en question ne soit plus offert. M. McNulty affirme que dans un tel cas, l'assureur remplacera le composant endommagé par la version actuelle du produit en question. « Cette situation n'est pas inhabituelle et ne nous préoccupe pas particulièrement dans le cas des bâtiments certifiés LEED, par exemple, car les produits LEED évoluent constamment, s'améliorent et deviennent souvent moins chers », observe-t-il.
Si un bâtiment subit un sinistre et que son propriétaire décide de le reconstruire de manière à obtenir la certification LEED ou une autre certification, des produits écologiques pourront être choisis si un avenant de reconstruction écologique a été annexé au contrat d'assurance. En l'absence d'un tel avenant, la personne assurée peut accepter de payer la différence pour passer à un produit plus respectueux de l'environnement après un sinistre, mais quelques facteurs – outre le coût – pourront influencer sa décision.
Des considérations telles que la disponibilité du produit écologique ou le temps nécessaire à son installation sont des facteurs qui peuvent avoir des conséquences sur la garantie. « Comme la plupart des contrats d'assurance des entreprises comportent une garantie des pertes d'exploitation, si les travaux prennent plus de temps, par exemple parce que les composants écologiques font l'objet d'une commande spéciale et que les réparations ou la reconstruction ne peuvent être effectuées dans la période de remise en état prescrite, les frais associés au retard ne seront pas couverts », fait remarquer M. McNulty.
La rénovation résidentielle
La population en général cherche aussi des moyens de rendre les habitations plus respectueuses de l'environnement. Les gens ont pris conscience que des gestes simples comme le fait de remplacer les ampoules grillées par des ampoules DEL à faible consommation d'énergie et de choisir des modèles plus écoénergétiques au moment de remplacer des appareils ménagers peut contribuer à réduire la facture de services publics. Ainsi, lorsqu'il s'agit d'effectuer des rénovations ou de remplacer des systèmes importants comme la chaudière ou le toit, les gens sont prêts à envisager des options écologiques.
Les assureurs canadiens prennent conscience du rôle qu'ils peuvent jouer pour inciter leur clientèle à réduire son empreinte carbone : ils ont commencé à offrir une garantie qui encourage les rénovations écologiques en cas de sinistre. Huma Pabani, dirigeante, Environnement et Affaires nationales, Environnement, Relations gouvernementales et de l'industrie à TD Assurance, explique : « Notre protection pour reconstruction éco-efficace s'inscrit dans notre stratégie ESG et fait partie de nos efforts visant à aider les propriétaires d'habitation à composer avec les risques liés au climat et à accroître leur résilience sur ce plan. »
La protection pour reconstruction éco-efficace de TD Assurance est incluse sans frais dans le forfait d'assurance habitation améliorée de TD, offert à l'égard des résidences principales (maisons et appartements en copropriété), des habitations secondaires (maisons et appartements en copropriété) et des logements pris en location. Aux termes de cette garantie, en cas de sinistre, la personne assurée peut faire installer des matériaux respectueux de l'environnement ou écoénergétiques représentant au maximum 10 % de plus que le montant du sinistre couvert, jusqu'à concurrence de 50 000 $ . Cette protection a été lancée en 2020; comme il s’agit toutefois d’une protection intégrée à l'assurance habitation améliorée de TD Assurance, Mme Pabani ne pouvait pas dire si cela fait de l'assurance habitation améliorée une option plus intéressante. D'autres assureurs au Canada offrent une protection semblable, mais Mme Pabani croit que parfois, la protection en question est facultative ou, si elle est intégrée au contrat d'assurance habitation comme à la TD, les montants de garantie sont moins élevés.
Conclusion
Les rénovations sont coûteuses et déstabilisantes dans le meilleur des cas. Toutefois, de plus en plus de Canadiens et Canadiennes se rendent compte qu'en intégrant des produits et des matériaux écologiques dans leurs travaux de rénovation, ils en auront plus que pour leur argent : ils contribueront à la réduction des émissions de GES.
L'utilisation des données satellitaires par l'industrie de l'assurance
Il y a moins de 10 ans, lorsque les drones ont fait leur apparition, on a beaucoup parlé de leur utilisation potentielle aux fins de l’inspection des éléments difficiles à atteindre en personne et aux fins de l'appréciation du risque et du règlement des sinistres. Bien que les drones aient toujours leur utilité , les images satellite et données satellitaires commerciales sont désormais sous les feux de la rampe. La présente section du bulletin porte sur certains usages que l'industrie de l'assurance fait des données satellitaires.
C'est en 1957 qu'a été lancé en orbite Spoutnik 1, le premier satellite à avoir été construit par l'homme. En 1965, Intelsat 1, le premier satellite commercial, était lancé. Il fournissait des services de télécommunication et de radiodiffusion entre l'Amérique du Nord et l'Europe . Il n'est pas facile de déterminer le nombre exact de satellites qui sont aujourd’hui en orbite autour de la Terre; leur nombre semble dépendre de la source consultée et même du jour où la ; recherche est effectuée . On peut dire sans se tromper qu'il y a à l'heure actuelle plus de 5 000 satellites opérationnels en orbite autour de la Terre, dont des satellites gouvernementaux, militaires, civils et commerciaux.
Que sont les données satellitaires?
Les données satellitaires sont essentiellement des informations relatives à la Terre qui sont recueillies par des capteurs intégrés aux satellites artificiels, puis transmises vers la Terre. Les photos à haute résolution que nous avons tous vues dans les reportages ne sont qu'un exemple de données satellitaires provenant des « satellites d'observation de la Terre ». Ces photos sont issues de la télédétection passive. C'est la résolution spatiale qui détermine le plus petit objet que le capteur du satellite pourra détecter au sol. Plus la superficie couverte par un pixel est petite, plus la résolution de l'image est élevée. Si la résolution d'un capteur satellite est de 100 mètres, la plus petite image qu'un pixel peut capter est de 100 mètres carrés. La résolution spatiale des images satellite s’exprime habituellement en mètres . La résolution temporelle d'une image correspond à la période pendant laquelle les données ont été acquises .
Les satellites peuvent aussi recueillir des données par le biais de la télédétection active : ils envoient alors de l'énergie vers la Terre et mesurent l'énergie reçue en retour, à l'aide de capteurs. Les satellites dits SAR (pour synthetic aperture radar, ou radar à synthèse d'ouverture) utilisent des technologies de télédétection active comme le radar et le laser . Les satellites SAR peuvent fournir toutes sortes de données, comme de l’information sur l'élévation et sur les niveaux d'humidité dans le sol, la roche et la vegetation. La télédétection active fonctionne en tout temps, de jour comme de nuit et sans égard aux conditions atmosphériques .
Les données d'imagerie par satellite sont souvent traitées, interprétées et complétées au moyen d'autres données. C'est la combinaison d'images satellite et de données provenant d'autres sources, une fois analysée avec l'aide de l'intelligence artificielle, qui produit des données utiles pour les assureurs. Par exemple, l'outil NatCat de Swiss Re combine les données tirées de l'imagerie par satellite et des données sur les risques et les sinistres ainsi que d'autres données pour fournir une analyse de l'exposition aux catastrophes naturelles pour n'importe quel endroit dans le monde.
La modélisation et l'évaluation des risques
On utilise couramment les données satellitaires pour prévoir la gravité des tempêtes, des incendies de forêt et d'autres catastrophes naturelles. Il s'agit là d'information importante pour la modélisation des sinistres futurs. La modélisation des catastrophes naturelles est nécessaire pour que les assureurs et les réassureurs puissent estimer les risques qu'elles posent pour leur portefeuille d'affaires. Mais ces modèles sont probabilistes, c'est-à-dire qu'ils fournissent de simples approximations de la réalité future. Même si la puissance de calcul actuelle permet de réaliser des modélisations avancées et de meilleure qualité, celles-ci dépendent de la qualité des données sur lesquelles elles reposent.
Quand un événement catastrophique se produit, les assureurs et les réassureurs doivent évaluer les sinistres attendus afin de pouvoir gérer leurs ressources, tant humaines que financières. C'est à ce moment qu'il est le plus important d’avoir rapidement accès à des données empiriques précises. Comme l'explique le propriétaire de satellites et fournisseur de données ICEYE lorsqu'il décrit l’utilité des données satellitaires dans l’évaluation des sinistres attribuables aux inondations, par exemple, la capacité d'observer l'étendue d'une inondation et sa profondeur à tout endroit dans le monde et de combiner ces données avec l'information sur les bâtiments touchés permet aux assureurs et aux réassureurs de disposer de chiffres précis sur les sinistres en temps quasi reel. Maintenant que des données d'observation avancées provenant de satellites, qu'ICEYE appelle « données de vérité », sont largement disponibles et plus abordables, des entreprises comme ICEYE s'attendent à ce que l'industrie de l'assurance réalise les avantages d'aller au-delà des modèles de modélisation des catastrophes naturelles pour évaluer les pertes après un événement.
L’appréciation du risqué
Les données satellitaires qui produisent des données sur les risques naturels peuvent fournir de l’information sur l'exposition à ces risques dans endroit donné, n'importe où dans le monde. Les responsables de l’appréciation du risque peuvent par exemple les utiliser pour déterminer, sans avoir à effectuer une coûteuse inspection en personne, si un bâtiment a subi des modifications susceptibles d'accroître le risqué.
Les services liés aux sinistres
Les données satellitaires peuvent être utilisées de plusieurs manières pour les services relatifs aux sinistres. Elles peuvent être utilisées pour des réclamations individuelles, par exemple lorsqu'il s'agit de déterminer si le toit de la maison d'une personne assurée a été endommagé pendant une tempête. L'experte ou l’expert en sinistres peut se servir de données satellitaires pour déterminer le moment du passage d'une tempête, ainsi que pour évaluer l'étendue des dommages occasionnés à un bâtiment donné. On peut également recourir aux données satellitaires dans le but de prévenir des fraudes, comme la présentation d'une réclamation exagérée. En ce qui concerne les réclamations au titre de l'assurance des pertes d'exploitation, par exemple, les données satellitaires peuvent aussi permettre de confirmer l'achèvement des réparations et la date de retour de la clientèle.
À la suite d'un événement d’envergure (tempête de grêle, ouragan, inondation ou feu incontrôlé), des zones peuvent être inaccessibles, mais les besoins des personnes assurées sont particulièrement importants dans une telle situation. « Grâce aux données satellitaires, on peut agir de façon proactive, c’est-à-dire déterminer les personnes assurées qui se trouvent dans une zone particulière et les ressources nécessaires. S'il s'agit d'une situation où tout le monde doit intervenir, on peut s'assurer d'avoir suffisamment de personnel pour répondre aux appels et aider les personnes assurées qui se trouvent dans cette zone », affirme Linda Paccanaro, vice-présidente du service des réclamations et du contrôle de la qualité chez Baird MacGregor. « En cas de catastrophe de grande ampleur, on peut utiliser les données satellitaires afin de faciliter l'établissement des priorités et l'élaboration de plans d'action visant à gérer le volume d'appels entrants », ajoute-t-elle.
Accélérer le règlement des sinistres est crucial pour les relations avec la clientèle et la fidélisation, particulièrement lors de catastrophes de grande envergure. Le fait de disposer de données satellitaires après un événement catastrophique peut même aider à commencer le traitement des réclamations avant que les personnes touchées communiquent avec leur cabinet de courtage pour obtenir de l'aide. « Si la maison d'une personne a été totalement rasée ou brûlée, la personne a besoin d'argent sur-le-champ. Donc, si nous avons accès à des données qui peuvent nous aider à rapidement venir en aide à notre clientèle, c'est génial. Après tout, notre raison d'être, c'est d'aider les gens », déclare Mme Paccanaro.
Au Japon, Tokio Marine & Nichido and Fire Insurance (TMNF) utilise des données satellitaires pour traiter les sinistres après de grandes inondations. « Au Japon, où TMNF détient environ 25 % des parts du marché de l'assurance des biens, nous nous efforçons d'accélérer le traitement des réclamations en recourant aux données satellitaires. Cela contribue à la gestion efficace des réclamations, car les données satellitaires nous aident à déterminer quelles sont les zones les plus touchées et donc où procéder immédiatement à l’expertise des sinistres. Grâce aux données satellitaires, nous pouvons déterminer la profondeur des eaux de crue dans différentes zones et savoir où les dommages risquent d’être plus importants », explique Satoshi Ohkuma, responsable de l'innovation numérique au Tokio Marine Innovation Lab (New York).
Depuis 2020, TMNF collabore avec l'entreprise finlandaise ICEYE pour améliorer le paiement des sinistres. Comme la technologie avancée d'acquisition d'images SAR à partir de 21 satellites et les analyses de données en temps quasi réel d'ICEYE lui ont permis de concrétiser ses objectifs commerciaux à long terme au chapitre du traitement des reclamations, TMNF a conclu un accord de capital et d'alliance commerciale avec l’entreprise en février 2022 .
L’assurance paramétrique
On peut également utiliser des données satellitaires avancées pour créer des produits d'assurance paramétrique, ou basée sur un indice. L'assurance paramétrique prévoit le versement de paiements prédéterminés en fonction d'événements déclencheurs tels que la vitesse du vent, la quantité de pluie, les températures extrêmes et l'activité sismique (tremblement de terre). On peut utiliser les données satellitaires pour déterminer rapidement et avec précision si un seuil de déclenchement a été franchi. Par exemple, un contrat d'assurance contre les perturbations de la chaîne d'approvisionnement basé sur un indice pourrait prévoir le versement d'une indemnité en cas d'inondation atteignant une certaine profondeur sur le site d'un fournisseur. Grâce aux données satellitaires, il est facile d'obtenir de l’information précise et opportune pour déterminer si le déclencheur a été atteint, ce qui facilite la décision de verser ou non l'indemnité.
Les facteurs à considérer lors de l'achat de données satellitaires
Il faut considérer le coût des données, leur caractère actuel – autrement dit, une mise à jour assez régulière pour permettre une comparaison utile – et leur pertinence (des images du sud de l'Ontario ne faciliteront pas l'évaluation d'une culture dans les Prairies). Pour ce qui est de l'utilité de ces données, comme l'a dit Scott Hastings, vice-président du service de la technologie de l'information chez Tokio Marine Canada Ltd, lorsqu'il s'agit d'acheter de telles données et d’en choisir le fournisseur, l'évaluation s’effectue comme dans le cas de toute autre dépense. Si l'information en question est utile, vous avez tout intérêt à vous abonner.
Diverses sources et organisations gouvernementales fournissent des données satellitaires gratuitement, dont la NASA, la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration) et DigitalGlobe.
Conclusion
Les données satellitaires ont longtemps été considérées comme utiles surtout pour les grands assureurs et réassureurs, à des fins telles que la modélisation et l'évaluation des risques. Aujourd'hui, grâce à la combinaison d'images satellite et de vastes quantités d'autres données, cette technologie autrefois insolite est devenue inestimable pour l'industrie de l'assurance, et ce, dans divers contextes.